Moto tout-terrain : effet de mode ou lame de fond ?
Hors-série spécial Trail, influenceurs qui partent au bout du monde les roues dans la terre, gamme tout-terrain dans toutes les marques et chez tous les équipementiers, Alpes Aventure Motofestival …. Le trail envahit la communication du monde de la moto.
Vous vous posez donc la question : rouler dans la terre est-ce intéressant quand on aime la moto juste pour se balader ou voyager ? Est-ce un effet de mode ? Alors sortons de notre zone de confort et plongeons dans l’univers tout-terrain pour découvrir ses bienfaits.
La déferlante terre et boue
Depuis quelques années lorsque vous arpentez les allées des salons de la moto, tous les constructeurs dévoilent des gammes toujours plus larges de moto et d’équipements dédiées à la pratique dans la terre, à grand renfort de communication musclée par des professionnels de l’enduro réalisant des prouesses techniques avec des motos de série. Ainsi Pol Tarrès sur sa Yamaha Ténéré 700 participant à la course d’extrême enduro la Red Bull Romaniacs ou Antoine Méo arrivant dans les premiers à l’Erzbergrodéo au guidon d’une Ducati Desert X.
Les possibilités de stages tout-terrain se multiplient, par exemple la mutuelle des motards a créé deux journée open trail qui sont venues compléter les journées open piste, pour débuter ou se perfectionner, les grands constructeurs, Yamaha, Honda, Suzuki, Ducati, BMW disposent de plusieurs centres tout-terrain à leur nom en France. Les réseaux sociaux regorgent de comptes pour apprendre à rouler hors du bitume. Au-delà des exploits techniques difficilement atteignables par le commun des motards et des courses réputées : le voyage et ses horizons infinis, par exemple Capitaine Morgan, gingeroutrider. Traverser l’Afrique, l’Asie, l’Europe, l’Amérique, être au contact du pays, au plus près de ses paysages et des habitants. Découvrir le monde, être un explorateur des temps modernes : ces machines nous vendent des morceaux d’aventure.
Autant de pratiques que de motards
Enduro, cross, rallye, voyage, balade, trail, trail endurisant, trial, quand on parle tout-terrain, il ne s’agit pas d’une pratique mais de plusieurs disciplines qui ont chacune leur spécificités et machines adaptées à la pratique. Et ensuite, il y a le motard, ses capacités physiques et mentales, ses envies, son bagage technique, son environnement. Petit lexique afin de ne pas se retrouver dans une course alors que l’on voulait simplement se balader.
Le moto-cross (et supercross) : pratiqué sur un terrain fermé avec une moto non homologuée pour rouler sur le domaine public (chemins, routes). Équivalent de la piste de vitesse mais dans la terre, le parcours est constitué de saut, bosses, dénivelés. Peut se pratiquer en loisir mais surtout en compétition, nationale ou internationale. Le Moto-cross nécessite une bonne condition physique pour enchainer les tours de terrain accidenté à haute vitesse.
L’enduro se pratique sur des motos très proches des moto-cross, mais homologuées pour circuler sur la voie publique c’est-à-dire disposant d’une plaque d’immatriculation et de l’éclairage nécessaire. Le moteur est également réglé différemment pour être moins nerveux et permettre le franchissement d’obstacles (pierres, troncs). La moto est légère (100kg) et le réservoir petit : 10l ce qui ne donne pas beaucoup d’autonomie. Les pneus doivent également être homologués pour la route. Les compétitions d’enduro sont comparables aux compétitions de rallye routier : elles se déroulent sur des circuits ouverts tracés dans la nature, alternant des spéciales chronométrées et des trajets de liaisons. Le parcours comprend des difficultés techniques de franchissement. En dérivé de l’enduro, les courses sur sable ont fait leur apparition, la plus connue étant l’enduropale du Touquet. Le cross-country mix entre enduro et cross, course d’endurance en terrain naturel balisé sur un parcours de 5 à 10km. Le hard enduro et extrême enduro sont des disciplines extrêmes où rallier l’arrivée est déjà un exploit en soi.
Le trial, discipline aérienne qui nécessite précision et équilibre consiste à franchir des obstacles naturels ou artificiesl sans poser le pied au sol. En compétition les obstacles sont répartis en zone, endroits balisés où les juges observent les concurrents. Chaque zone comporte plusieurs parcours avec chacun un niveau de difficulté que le pilote emprunte en fonction de sa catégorie. La vitesse de passage des obstacles n’est pas comptabilisée mais le concurrent doit franchir la « zone » d’obstacle en un temps maximum imparti sous peine de pénalité. Les motos se reconnaissent aisément, légère, sans selle.
Le rallye-raid est le pendant tout-terrain du rallye routier : alternance de spéciales et de liaisons mais avec une spéciale d’une ou plusieurs centaines de kilomètre par jour sur plusieurs jours. La navigation se faisant au roadbook, à la boussole ou au gps. Les rallye raid se déroulent dans des zones peu habitées, le plus souvent dans des zones désertiques. Certains rallyes peuvent être à vocation humanitaire, sans notion de classement à l’arrivée, par exemple le rallye des gazelles. Les motos sont des motos d’enduro modifiées : les suspensions préparées, un gros réservoir qui permettra de parcourir la ou les centaines de kilomètres de la journée, la tour de navigation, la caisse à outil…
Chacune de ces disciplines se pratique en compétition mais il existe aussi les dérivés loisirs : la randonnée organisée enduro qui va utiliser les même chemins qu’une compétition en enlevant la nation de chronomètre, les entrainements cross etc.
Sans aucune notion de compétition, le Trail, chemin en anglais consiste à rouler dans les chemins ouverts à la circulation, qu’ils soient autour de sa maison en balade ou à l’autre bout du monde en voyage au long cours.
Une moto Trail est une moto polyvalente qui permettra à la fois de voyager sur route et qui ne rechignera pas à aller dans la terre, c’est un couteau suisse, haute sur roue pour aller dans la terre, elle a un poids classique pour une moto (200kg et plus). Adaptée à la balade et aux grands voyages, maniée par un professionnel elle pourra faire des exploits mais pour le motard lambda son poids sera un frein dans les zones technique. En fonction des marques, le trail sera plus adapté à la route, et n’aura parfois de tout terrain que le look baroudeur à grandes roues haut sur suspensions. Les trails légers sont des motos dont le poids contenu autour des 150kg permettra de faire des sorties plus techniques mais moins adaptés aux longues distances sur le bitume. Les moto trails sont par conséquent homologués.
A vous de définir votre envie, d’essayer afin d’apprendre et de choisir celle qui vous convient le mieux.
Personnellement, j’ai toujours entendu que la meilleure école d’apprentissage moto c’est la terre, mais j’avais peur du moindre gravier et il aura fallu un pari perdu pour s’inscrire à une randonnée tout-terrain organisée 7 mois plus tard alors que je n’avais pas la moto adaptée.
Un apprentissage aussi bien physique que mental
Après avoir trouvé la moto adaptée à la balade que je devais faire et à mon gabarit, j’ai commencé par un stage. A moto, on apprend continuellement, et quand j’ai mis les roues dans la terre j’ai eu l’impression de redémarrer de zéro.
Sur un sol instable on est forcé de corriger ses erreurs de position, de regard, ses crispations moins handicapantes sur la route mais qui ne pardonnent pas dans la terre ou les cailloux. Lorsqu’on est face à une difficulté, en montée ou descente, on cherche aussi la meilleure trajectoire, celle qui sera la plus facile. C’est extrêmement complet, la tête travaille autant que le corps.
La position debout mobile est exigeante, on travaille avec la moto, on l’accompagne ou la corrige en permanence dans les chemins les plus techniques, les pistes roulantes permettent de se reposer tout en restant attentif.
Ne pas avoir peur de la chute. Elles sont facilitées par la hauteur de selle pour les moins de 1m75 et par le terrain pas toujours facile à appréhender, mais elles arrivent le plus souvent à basse vitesse. L’équipement permet de limiter les conséquences, je teste donc régulièrement les protections des jeans et veste 2Milesix et peut vous assurer qu'ils absorbent bien les chocs. Bien protéger sa machine est essentiel pour éviter de se retrouver avec un levier cassé au milieu d’une montée compliquée. J’apprends que si la moto glisse ce n’est pas forcément grave et c’est souvent rattrapable.
De retour sur route, les erreurs et mauvaises habitudes prises au fil des ans se trouvent corrigées, je redécouvre ma moto. J’ai plus confiance et roule un peu plus vite.
Des chemins changeant au fil des saisons
Les routes autour de chez nous ne sont pas indéfinies et si on roule régulièrement sur la route, il y a un moment où on a le sentiment d’avoir fait le tour, sauf à partir en voyage. J’ai l’impression que c’est un effet secondaire du voyage : je me lasse des routes de proximité. Les routes évoluent au fil des saisons, feuilles d’automne, mousse sur les routes de forêt, mais le renouvellement est assez peu prononcé.
Les chemins changent de configuration en fonction des saisons : des ornières boueuses gorgées d’eau l’hiver, des herbes folles qui cachent les ornières, des chemins ravinés par l’eau qui sont presque des ruisseaux deviennent une trace de poussière compacte l’été. On redécouvre (presque) à chaque sortie un nouveau chemin.
Préparer ses balades
Oubliez vos habitudes prises sur la route, partir en sortie moto tout-terrain nécessite un minimum de connaissances légales et de lecture de cartes ign et cadastrales. Cela peut paraitre fastidieux au début mais une fois que vous vous êtes fait votre cartographie personnelle des chemins accessibles autour de chez vous, les possibilités sont variées.
La création de balade tout-terrain est un vrai exercice qui peut prendre du temps, en fonction de la région où vous vous trouvez. La législation française étant complexe, inscrivez-vous au codever, association pour soutenir les loisirs verts, vous obtiendrez ainsi le guide du codever, qui rassemble les points à connaitre pour circuler légalement dans les chemins. Un chemin rural public est par défaut ouvert à la circulation sauf (et le sauf est toujours important en France) arrêté, représenté par un panneau ou une barrière et sauf dans certaines zones protégées. Certaines régions seront plus ouvertes que d’autres, la seule façon de connaitre réellement l’ouverture du chemin étant d’en être à l’entrée, aucune base de données ne rassemble les arrêtés de fermeture. Toute circulation hors piste, hors chemin ouvert à la circulation est interdite.
Le côté recherche de chemins ouverts ajoute un côté « jeu de piste » plutôt sympa sauf quand vous en êtes au cinquième demi-tour en 15 minutes face à des panneaux d’interdiction.
L’accès aux contrées reculées, l’essence de la moto trail
A moto, on se vit Christophe Colomb découvrant une nouvelle terre, alors même que nous sommes en Europe, en France ou dans sa région. La moto est un prisme qui augmente les sensations : le ciel est plus bleu, les paysages sont encore plus majestueux. Il suffit de lever la visière et nous subissons sur notre peau le premier des éléments : le vent.
Alors nous ne sommes clairement pas les premiers sur ces routes mais peu importe nous vivons les voyages moto en pionniers, seul existe le moment présent et cette langue de bitume qui défile sous nos roues. Pouvoir prendre le chemin de terre qui croise notre route nous plonge encore plus au cœur des éléments, nous emmène au sommet de la montagne et offre un sentiment de communion avec les éléments encore plus fort. Pas de restaurant ou de boutique à touristes, juste nous et une vue qui se mérite. Le lendemain on mange au bord de cette petite rivière loin de l’agitation du monde et de notre quotidien. Le dépaysement est démultiplié par rapport au voyage sur la route, comme l’esprit de camaraderie lorsque l’on croise un autre groupe de motards baroudeurs qui se posent des questions avant de traverser ce gué.
Si vous aimez visiter les villes lors de vos voyages à moto, alors mettre les roues dans la terre ne sera pas une compétence nécessaire. Mais si vous aimez sortir des zones à touristes et vous faire vos expériences alors mieux comprendre et ressentir l’équilibre général de la moto sur un sol instable vous permettra d’être plus à l’aise pour déjeuner à ce restaurant face à la mer de Barents, au bout de 5 kilomètres de piste.
Si vous aimez le sport, le tout-terrain est plus physique que la route, on a toujours une petite suée dans la journée, grâce à une montée un peu technique par exemple. Si vous êtes agoraphobe, vous pouvez rouler une journée en croisant 5 personnes maximum, même dans la région la plus peuplée de France.
Au-delà d’un effet de mode et sans tomber dans les sirènes du marketing, mettre ses roues dans la terre et la boue permet de se dépasser et d’être plus à l’aise à moto, notamment en voyage.
Dites-nous en commentaire si vous avez déjà testé le tout-terrain, si vous en faites régulièrement et ce que cela vous apporte ou pourquoi vous ne voulez pas en faire.
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